Dans un communiqué daté du mardi 10 juin 2025 et lu en plénière de l’Assemblée nationale, le ministre d’État, Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Constant Mutamba, a officiellement demandé la récusation du Procureur général près la Cour de cassation et de l’ensemble des magistrats placés sous son autorité.
Le motif évoqué est celui d’un conflit d’intérêts personnel et une inimitié jugée incompatible avec la poursuite impartiale de l’enquête lancée contre lui pour détournement de deniers publics.
Un conflit d’intérêts au cœur de la demande
Le ministre Mutamba justifie sa démarche par l’inimitié créée entre lui-même et le Procureur général, ainsi que par la multiplication de critiques et d’entraves qu’il attribue à une campagne judiciaire dirigée contre sa personne.
Dans son courrier adressé au magistrat, il fait valoir que les poursuites à son encontre relèvent davantage d’une vendetta politique que d’une instruction objective, et que cette partialité manifeste empêche un traitement équitable du dossier.
Le procès du projet de prison de Kisangani
Au centre de cette procédure, une enquête pour détournement présumé de 19 millions de dollars destinés à la construction d’une prison à Kisangani.
Le ministre rappelle que ce projet, approuvé par le Conseil des ministres, avait fait l’objet d’appels d’offre conformes et d’un contrat validé par la Première ministre.
Or, le blocage des fonds par la CENAREF et l’absence de preuves de détournement, selon lui, ne sauraient justifier une instruction motivée uniquement par la volonté de nuire.
Des magistrats visés et des aveux de blocage
Dans son ordonnance, Constant Mutamba souligne que la société chargée de réaliser les travaux avait fourni l’ensemble des documents requis (statuts, impôts, autorisations), contredisant les allégations du parquet.
Il évoque également son absence de réponse à des demandes de justification de virements liés à une acquisition immobilière à Bruxelles et à un audit interne, qu’il attribue à un état de santé temporaire, avant d’être rappelé pour mise en œuvre des instructions gouvernementales.
Vers un nouvel examen du dossier
Cette récusation met désormais la balle dans le camp de l’Assemblée nationale, qui devra valider ou rejeter la demande avant que l’enquête ne se poursuive sous une nouvelle autorité judiciaire.
Entre-temps, le ministre Mutamba réaffirme sa confiance dans la décision présidentielle d’engager les réformes de la justice notamment la décongestion des prisons, la transparence des recettes, la réforme du système pénitentiaire, et se dit prêt à accueillir une instruction réellement qualifiée de saine.
En rompant avec le parquet actuellement en charge, le ministre de la Justice entend garantir la neutralité de la procédure et la restauration de la confiance dans le traitement des affaires les plus sensibles.
L’issue de ce combat institutionnel déterminera les contours de l’indépendance judiciaire en RDC.
Lydia Mangala


