Lors de la conférence « La photographie comme écriture », tenu ce vendredi 23 mai 2025 dans la Bibliothèque du Centre Wallonie-Bruxelles de Kinshasa, Augustin Bikale, chargée de programme culture de l’Unesco, est revenu sur la place stratégique qu’occupe la photographie au sein des industries culturelles et créatives (ICC).
À travers son intervention, il a montré comment, de la publicité à la conservation patrimoniale, elle est à la fois vecteur d’expression artistique et d’innovations économiques.
La photographie : un pilier économique et culturel

Pour Bikale, les industries culturelles et créatives constituent des secteurs dynamiques, associant création, production et commercialisation.
Dans cette chaîne de valeur, la photographie intervient dès la conception, moodboards publicitaires, visuels de marque, jusqu’à la consommation par le public : banques d’images, licences ou ventes de tirages.
Il rappelle que la mode, le design et le marketing s’appuient aujourd’hui quasi exclusivement sur des images fortes pour modeler les comportements de consommation et diffuser les tendances.
« La photographie, en tant que langage visuel universel, est devenue un puissant vecteur de mémoire collective et de développement économique », a-t-il déclaré.
Cette dimension économique se double d’une portée sociale : les photojournalistes, en documentant conflits ou injustices, participent à la liberté d’expression et à la construction d’une conscience citoyenne.
Défis numériques et cadre juridique en RDC

Bikale a ensuite souligné les effets de la démocratisation du smartphone :
« Chacun devient potentiellement producteur d’images, bouleversant la culture visuelle et la notion de droit d’auteur. »
Face aux violations massives en ligne, il promeut des solutions technologiques (NFC, blockchain) pour tracer et monétiser les œuvres.
En RDC, le secteur manque encore de structuration et de financement. Toutefois, l’ordonnance n° 25/030 du 12 mars 2025 marque un tournant en instituant des principes fondamentaux relatifs à la culture et aux arts, et en prévoyant des mécanismes de soutien public.
« C’est un cadre légal inédit qui pose les bases d’une véritable industrie photographique congolaise » affirme-t-il.
Des pistes pour soutenir la photographie congolaise

Pour renforcer sa place dans les ICC, Augustin Bikale propose :
– Un festival national de la photographie, pour accroître visibilité et légitimation ;
– L’intégration de la photographie aux programmes éducatifs (Académie des Beaux-Arts, Académie de Bukavu) ;
– Le soutien aux artistes congolais lors des rencontres internationales (Bamako, Abidjan, Dakar) ;
– La création de résidences artistiques et d’incubateurs pour favoriser les synergies entre créateurs, entrepreneurs et institutions.
En confrontant art et industrie, la photographie prouve sa résilience face aux défis technologiques, intelligence artificielle, métavers, réalité augmentée, et continue de repousser les frontières de l’expression créative.

À travers son exposé, Augustin Bikale a montré que la photographie est bien plus qu’un simple procédé technique mais en plus c’est un art exigeant, un métier diversifié et un levier de croissance.
En soutenant son développement tant sur le plan culturel qu’économique, la RDC pourra valoriser son patrimoine, générer des emplois et enrichir sa scène artistique.
Lydia Mangala


