À l’occasion de la conférence dénommée « Leadership au Féminin : Oser briller », organisée par la Dynamique Femme UNIKIN, Marie-Jo Tshaykolo, manager de programme au Centre Carter, a pris la parole, le vendredi 31 octobre 2025c, autour du sous-thème : « Responsabilité sociale et engagement communautaire ».
Femme d’expérience, à la fois stratège du développement et actrice de proximité, elle a livré une réflexion profonde sur la manière d’agir avec les communautés locales sans leur imposer des modèles préconçus.
Pour elle, l’action sociale ne peut porter du fruit que si elle se fonde sur l’écoute, la participation et le respect mutuel.
« Nous ne devons pas venir imposer des solutions aux communautés. Il faut travailler avec elles, pas à leur place », a-t-elle souligné d’emblée.
L’approche participative, clé d’une transformation réelle
Dans son exposé, Marie-Jo Tshaykolo a mis en lumière la philosophie du Centre Carter, qui privilégie le travail collaboratif avec les populations locales.
Elle a expliqué que chaque projet repose sur une approche inclusive, réunissant autour d’une même table toutes les parties prenantes entre autres société civile, autorités locales, organisations communautaires et groupes marginalisés, y compris les personnes vivant avec handicap.
« Nous commençons toujours par identifier ensemble les problèmes prioritaires, puis nous construisons les solutions collectivement. Rien ne doit être imposé d’en haut », a-t-elle précisé.
Cette méthode, qu’elle qualifie de conciliation participative, favorise non seulement l’adhésion communautaire, mais aussi la pérennisation des résultats.
Elle a expliqué que la durabilité d’un changement dépend de l’appropriation des initiatives par les bénéficiaires eux-mêmes.
« Tant qu’il n’y a pas d’adhésion locale, aucune action ne peut durer », a insisté la responsable de programme.
Quand la tradition devient un levier de changement
Pour illustrer l’impact concret de cette approche, Marie-Jo Tshaykolo a raconté une expérience vécue dans la province de l’Équateur, où son équipe a travaillé sur la suppression de certaines pratiques discriminatoires envers les femmes.
« Nous avons réuni les chefs coutumiers, les leaders communautaires, les femmes et les jeunes. Il fallait comprendre ensemble pourquoi ces pratiques existaient et comment les changer sans heurter la culture locale », a-t-elle expliqué.
Elle a relaté que le processus avait nécessité plusieurs consultations et rituels traditionnels, afin d’obtenir le consentement des communautés et des anciens.
« Dans certains villages, les chefs ont convoqué les ancêtres pour leur demander la permission de changer les pratiques. Ce respect du cadre culturel a permis d’instaurer la confiance », a-t-elle raconté.
Grâce à cette démarche, certaines traditions jugées néfastes, notamment celles qui humiliaient ou marginalisaient les femmes, ont été officiellement abrogées, ouvrant la voie à un changement durable et accepté.
« Le changement n’est pas venu de l’extérieur. Il est né de la communauté elle-même », a-t-elle affirmé.
Respecter, écouter et co-créer avec les communautés
Marie-Jo Tshaykolo a insisté sur une idée essentielle : travailler avec une communauté, c’est d’abord apprendre à écouter.
« Beaucoup de personnes n’écoutent pas pour comprendre, mais pour répondre. Il faut apprendre à écouter vraiment, avec le cœur, pour saisir les réalités vécues », a-t-elle déclaré.
Elle a expliqué que l’écoute permet de mieux cerner les besoins, les perceptions du bien-être et les aspirations de chacun.
« Le bien-être n’a pas la même signification pour tout le monde. Ce qui représente le progrès pour l’un peut être une menace pour l’autre. Il faut d’abord comprendre avant d’agir », a-t-elle ajouté.
Cette philosophie de co-création du changement est, selon elle, le socle d’une transformation durable.
Elle a également rappelé que le respect des identités locales constitue un principe non négociable :
« Si vous montrez à une communauté que vous vous croyez supérieur, elle se refermera. Mais si vous écoutez avec humilité, elle s’ouvrira à vous », a-t-elle observé.
Un leadership communautaire fondé sur l’humilité
Dans la dernière partie de son intervention, Marie-Jo Tshaykolo a exhorté les acteurs du développement et les jeunes leaders à adopter une posture d’humilité.
Elle a insisté sur la nécessité de travailler avec les populations, et non pour elles :
« Le rôle d’un agent de développement n’est pas de briller, mais de servir. Quand on accompagne une communauté, on ne cherche pas à être vu, on cherche à bâtir avec elle », a-t-elle souligné.
Elle a également rappelé l’importance de l’éducation communautaire et de la sensibilisation progressive :
« Le changement durable naît toujours d’un processus lent, fait d’écoute, de dialogue et de confiance », a-t-elle dit.
Pour Marie-Jo Tshaykolo, aucune réforme sociale ne peut réussir sans la participation active des populations concernées.
L’écoute, le respect et la collaboration sont les piliers d’une responsabilité sociale authentique et efficace.
« Quand on écoute et qu’on respecte, on construit du solide. Le changement ne se décrète pas, il se partage », a conclu la représentante du Centre Carter.
Lydia Mangala


